Elena LAZĂR*,
Faculty of Law, University of Bucharest
Résumé: Les éléments de preuve représentent un point essentiel de tout processus pénal. Puisque l’obtention de preuves constitue un domaine qui fait l’objet de l’activité de tout tribunal, pour les besoins de cet article, nous analyserons dans quelle mesure la jurisprudence sur les droits de l’homme sert de base aux décisions de la Cour pénale internationale et quelles sont les conditions et les situations qui attirent au niveau théorique et pratique l’applicabilité de la règle d’exclusion des preuves altérées.
Mot clés : preuves, admissibilité, droits de l‘homme, tribunaux, vices
Abstract:
Evidence is a crucial aspect of any criminal case. As the acquisition of evidence is a domain that encompasses the activities of every court, for the purposes of this article, we will analyze to what extent human rights caselaw serves as the foundation for judgments rendered by the International Criminal Court, and what conditions and situations theoretically and practically attract the applicability of the rule of exclusion of tampered evidence.
Keywords: evidence, admissibility, human rights, tribunals, flaws
1. Introduction
Dans une société démocratique, la justice est obtenue par le biais d’une procédure préétablie, en respectant un ensemble de règles juridiques qui fixent les limites dans lesquelles une solution honnête et véridique est obtenue, sans jamais méconnaître les droits de chaque partie au litige. Au niveau national, chaque État s’engage à garantir droits fondamentaux et à assurer un standard minimal de protection de ces droits. Ainsi, si l’État échoue dans cette démarche, si un droit fondamental, reconnu au niveau international, est violé, l’individu peut faire appel à une instance internationale spécialisé. Il s’agit d’un dernier recours disponible pour ceux dont les droits ont été violés par l’État. Dans la mesure où la violation alléguée est avérée, l‘État peut être obligé de fournir une compensation, d’amender la loi, etc.
L’obtention et l’utilisation de preuves représente un élément essentiel du processus. Les éléments de preuve permettent de prouver des faits essentiels à la résolution d’une affaire. Le respect de l’intégrité d’un procès réside notamment dans la manière dont les preuves sont recueillies. Aussi impératif soit-il de prouver un fait, une preuve obtenue illégalement justifierait son exclusion des preuves – en faisant une application du principe selon lequel “la fin ne justifie pas les moyens”.
L’obtention de preuves étant un domaine d’activité de tout tribunal, nous analyserons dans le cadre de cet article dans quelle mesure la jurisprudence en matière de droits de l’homme sous-tend les décisions de la Cour pénale internationale et quelles demeurent les conditions et les situations qui attirent, au niveau théorique et pratique, l’applicabilité de la règle d’exclusion des preuves altérées.
2. L’admissibilité des preuves devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme
En ce qui concerne le mécanisme de respect des droits fondamentaux, au niveau international, l’attention se porte sur la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH), actuellement la juridiction la plus renommée[1] spécialisée dans la protection des droits des individus. La Cour européenne des droits de l’homme veille ainsi à ce qu’un standard minimal[2] de protection soit respecté, et sa jurisprudence constitue un point de référence essentiel pour les tribunaux nationaux lorsqu’ils constatent une violation et motivent leurs jugements.
Le standard minimal implique que les États doivent inclure dans leur législation nationale un niveau de protection au moins égal à celui prévu par la CEDH, de sorte que les dispositions nationales soient égales ou même supérieures à la Convention en termes de respect des droits de l’homme, mais jamais inférieures.
Toutefois, la Convention ne fait pas référence à l’obtention ou à l’administration de preuves dans un procès. Cette omission n’est pas fortuite, puisque l’objectif de la Cour EDH est de constater la violation d’un droit fondamental énoncé dans la Convention. Elle n’a pas pour mandat d’examiner dans quelle mesure les autorités d’un État ont ou pas respecté les dispositions nationales[3]. Ainsi, lorsque la Cour examine une situation impliquant un mécanisme illégal d’obtention de preuves, ce n’est pas le mécanisme lui-même qui sera examiné par la Cour, mais la possibilité qu’un droit de la Convention ait été violé par l’utilisation de ce mécanisme[4]. C’est ainsi que la Cour de Strasbourg a statué qu’elle n’est pas habilitée à imposer une quelconque perspective sur l’admissibilité et l’utilisation des preuves dans un procès, ceci étant la prérogative exclusive du législateur national.[5]
Toutefois, afin d’atténuer la rigidité de l’affirmation ci-dessus, il convient de noter que la Cour EDH peut examiner la question de l’admissibilité des preuves en cas de violation prévue par la Convention. À côté de tous les droits substantiels, dont le droit à la vie, à la liberté et à la sûreté, le droit à la liberté de pensée et de conscience, etc., la Convention a également prévu de droits procéduraux, qui ne sont pas incorporés dans les libertés d’une personne, mais offrent “des garanties quant à l’application des droits et libertés qui lui sont reconnus devant les tribunaux”.[6] Il s’agit du droit à un procès équitable[7] et le droit à un recours effectif.[8] En vertu de ces dispositions, les preuves obtenues en violation d’un droit substantiel peuvent entraîner une violation des garanties du droit à un procès équitable, et le tribunal est tenu d’examiner dans quelle mesure la manière dont les preuves ont été obtenues a porté atteinte à l’équité du procès. À cet égard, la Cour EDH dispose d’une riche jurisprudence sur la collecte de preuves viciées au mépris des droits des individus, qui a constitué une base d’interprétation essentielle pour la Cour pénale internationale (CPI) dans la motivation de ses jugements.
Bien que la Convention ne prévoie pas de hiérarchie des droits énoncés en fonction de leur importance, dans la pratique, la violation des différents droits fondamentaux n’a cependant pas eu les mêmes conséquences[9]. Un traitement différent a été justifié, entre autres, par la nature absolue ou relative du droit violé. Contrairement aux droits absolus, les droits relatifs permettent une ingérence de l’autorité publique dans leur exercice. En principe, l’obtention de preuves obtenues par la torture permet de conclure à une violation du droit à un procès équitable.[10] En revanche, la même conclusion n’a pas toujours été tirée en ce qui concerne la violation du droit à la vie privée[11], et cette différence de traitement a été critiquée par la doctrine[12], et ces questions seront ultérieurement soulevées dans le cadre de l’analyse des dispositions du Statut de Rome relatives à la preuve. Dans l’ensemble, la Cour de Strasbourg s’est montrée réticente à déclarer des preuves irrecevables.[13] En ce qui concerne l’interdiction de la torture[14], la Cour a considéré que la violation de ce droit entraîne une atteinte à l’intégrité de l’ensemble du procès, car les valeurs protégées par cet article, ainsi que celles du droit à un procès équitable[15], s’avèrent d’une importance fondamentale, de sorte qu’aucun tribunal ne devrait fonder ses décisions sur des preuves obtenues en violation de ces valeurs.[16] Cette différence de traitement a également été justifiée dans la pratique par la consécration de l’irrecevabilité des preuves obtenues par la torture, dans la Convention des Nations unies contre la torture (CNUT), qui mentionne expressément leur exclusion automatique : “Tout État partie veille à ce qu’aucune déclaration dont il est établi qu’elle a été obtenue par la torturene puisse être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure, à moins qu’elle ne soit dirigée contre la personne accusée de torture en vue d’établir que cette déclaration a été faite”.[17] De plus, cette disposition de l’UNCAT a été considérée comme ayant une valeur coutumière, puisque le mandat octroyé par l’Assemblée générale de l’ONU aux rédacteurs de l’UNCAT à l’époque était précisément de codifier le droit coutumier.[18] L’élément objectif du droit coutumier a également été prouvé au fil du temps par la pratique uniforme et générale des juges de la Cour EDH d’exclure les preuves obtenues par la torture, en l’absence d’une disposition dictant expressément cette exclusion.[19] En tant que règle coutumière avérée, elle sera également contraignante pour les tribunaux internationaux qui reconnaissent la coutume comme source de droit, y compris la Cour pénale internationale.[20]
- L’admissibilité des preuves devant la Cour Pénale Internationale
Les tribunaux nationaux n’étant pas les seuls à traiter les litiges concernant les particuliers, la question se pose de savoir dans quelle mesure la jurisprudence des juridictions des droits de l’homme affecte le travail procédural des tribunaux pénales internationaux. Le mandat de respecter les droits fondamentaux se pose également dans ces tribunaux, l’interaction entre la Cour européenne des droits de l’homme et la Cour pénale internationale étant axée sur la nécessité d’interpréter les concepts propres au droit international des droits de l’homme. Ainsi, lorsqu’elles sont confrontées au débat sur une éventuelle ingérence illégitime dans l’exercice de ces droits, les juridictions internationales peuvent appliquer et citer dans leurs propres arrêts les mécanismes créés et utilisés en pratique par la Cour EDH.
Le Statut de la Cour pénales internationale énonce les sources du droit qui doivent être appliquées par la CPI et établit une hiérarchie des sources adaptée aux besoins de la Cour. La cour est tenue d’appliquer : (i) le Règlement ; (ii) le Statut ; (iii) “le cas échéant“, les traités internationaux et les règles générales du droit international humanitaire ; et (iv) les principes généraux du droit tels qu’ils découlent des systèmes juridiques nationaux, pour autant qu’ils soient conformes au Statut et au droit international public. Le Statut de la CPI prévoit également que la Cour peut suivre les “principes et les règles de droit telles qu’interprétées dans ses décisions antérieures.“
En tant que tribunal chargé de poursuivre et de faire répondre les individus des crimes qui heurtent la conscience de l’humanité, la Cour pénale internationale garde dans son portefeuille toute une série de taches liés à la protection des droits de l’homme, tant pour les victimes que pour les accusés. Tenir des individus responsables de crimes internationaux ne peut faire abstraction du droit à un procès équitable. Ainsi, selon l’État de Rome, la CPI utilisera dans ses décisions des dispositions “conformes aux droits de l’homme internationalement reconnus et sans aucune discrimination”. [21] Cette disposition incarne donc une « clause d’habilitation du droit relatif aux droits de l’homme ». Cela contraste fortement avec les Statuts et Règlements respectifs des Tribunaux Ad Hoc[22], qui ne précisent pas les sources du droit international qui leur sont applicables, sans parler de leur relation hiérarchique.
Le Statut de Rome contient de nombreuses dispositions relatives aux droits de l’accusé et à l’impératif pour les autorités de respecter ces droits, tant au stade du procès qu’à celui de l’enquête.[23] C’est ainsi la Chambre préliminaire[24] de la CPI qui est chargée de débattre de l’admissibilité des charges et de la légalité des différentes preuves requises pour l’affaire. Afin de faire répondre les individus soupçonnés d’avoir commis des crimes internationaux, le Bureau du Procureur (BDP) coopère avec les États dans l’administration des preuves nécessaires pour prouver l’imputabilité des actes en question. Cependant, quelle que soit l’ampleur d’une affaire pénale, un tribunal ne peut pas ignorer le caractère équitable des mesures ordonnées. Les pressions exercées pendant l’interrogatoire, l’absence d’un avocat de la défense, les fouilles sans discernement, etc. représentent des situations qui affectent la crédibilité et la valeur probante.
Selon le Statut de Rome, “la Cour peut se prononcer sur la pertinence et l’admissibilité des preuves, conformément au Règlement de procédure et de preuve, eu égard notamment à leur valeur probante et à la possibilité qu’elles portent atteinte à l’équité du procès ou à une appréciation équitable de la déposition d’un témoin.”[25]
La Chambre préliminaire détient le pouvoir de statuer sur l’admissibilité et la pertinence des preuves dans les affaires portées devant et dispose d’un droit discrétionnaire[26] à cet égard. Toutefois, il faut préciser que les deux concepts, pertinence et admissibilité, traitent de questions différentes.[27]
- L’analyse de critères de la pertinence et de l’admissibilité
Pour être pertinente, la preuve doit tout d’abord être relevant, c’est-à-dire avoir un lien réel avec le litige soumis au tribunal. La pertinence sert deux objectifs. Premièrement, il s’agit de la base juridique permettant d’exclure les éléments non pertinents. Deuxièmement, elle révèle d’emblée l’objectif de la preuve en question. Au moment de la proposition d’une preuve, les parties l’octroient un certain but dans l’affaire, ainsi elle ne soutiendra que la preuve du fait dicté au départ, même si la preuve elle-même pourrait révéler d’autres situations factuelles nécessaires à l’affaire.[28] Au-delà du test de pertinence, elle examine leur capacité à prouver réellement une situation factuelle sur laquelle le procès se [29]concentre. Cette capacité constitue la valeur probante[30]. La CPI a soulevé dans la pratique la nécessité de faire la distinction entre les concepts de valeur probante (“probative value”) et de force probante (“evidentiary weight”), qui, bien que similaires, traitent de questions différentes. La force probante est déterminée par un certain nombre de considérations relatives aux qualités intrinsèques de la preuve, y compris la crédibilité. Avant de déterminer sa capacité à prouver un point, la preuve doit être crédible prima facie.[31] Le poids de la preuve, quant à lui, examine la “force” de la preuve pour prouver un point particulier nécessaire à l’affaire et est déterminé à la fois par les qualités intrinsèques de la preuve et par la valeur et la qualité des autres preuves disponibles pour l’affaire.[32] Ainsi, contrairement à la valeur probante, le poids est déterminé à la fin de l’enquête, lorsque le jury a déjà examiné l’ensemble des preuves et est en mesure de déterminer dans quelle mesure l’admissibilité d’un élément de preuve porte préjudice au procès ou non.
Pour ce qui porte sur la recevabilité, une preuve est admissible lorsque son administration au procès ne nuit pas à l’équité du procès. Ainsi, une preuve peut être pertinente sans être admissible. L’équilibre entre la valeur probante et l’effet préjudiciable sur le procès a créé, dans la pratique, le problème de l’exclusion des preuves entachées de vices, identifié dans le langage juridique universel comme “la règle d’exclusion”. Comme spécifié par l’expression, “peut statuer”, lepara. (4) consacre un droit d’exclusion discrétionnaire. Au même article, cependant, le para. 7 semble à première vue consacrer une obligationd’exclure les preuves viciées. La relation entre les deux paragraphes a été expliquée par la Première Instance dans l’affaire Lubanga, en considérant que l’art 69 para. (7)[33] représente lex specialis par rapport aux autres dispositions sur l’admissibilité, y compris l’art. 69 para. (4).[34]
Ce paragraphe de l’art. 69 a suscité de nombreux débats, tant parmi les chercheurs que parmi les juges de la CPI. Toutefois, afin d’entamer le débat sur une éventuelle irrecevabilité au titre de l’article 69, para. 2, du Statut de Rome, certaines clarifications conceptuelles sont nécessaires.
En ce qui concerne la syntagme ‘Preuve obtenue par un moyen qui viole’, l’une des premières questions posées sur ces dispositions concerne l’auteur et le contexte de l’infraction. La question de preuves viciés soulève-t-elle la conséquence de l’exclusion uniquement dans le cas de violations commises par l’agent désigné par la CPI, ou l’article s’applique-t-il également aux violations commises au niveau national par les autorités sans l’assistance du Bureau du Procureur ? Cette situation est connue en droit américain sous le nom de “doctrine international du plateau d’argent”[35](“the international silver platter doctrine”), qui prévoit que la règle excluant les preuves viciées ne s’applique pas aux violations commises à l’étranger. Au même temps, la perplexité vient aussi du libellé de l’art. 69, para. 8, qui stipule que lorsqu’elle “se prononce sur la pertinence ou l’admissibilité d’un élément de preuve recueilli par un État, la Cour ne se prononce pas sur l’application du droit national de cet État.” Comme en droit international en général, et également au niveau de la CPI, le droit national n’est qu’une situation de fait. Contrairement aux différentes approches des tribunaux nationaux, la CPI n’applique pas la doctrine ci-dessus, considérant que les valeurs telles que les droits internationalement reconnus doivent être protégées indépendamment du contexte de leur violation. [36]
L’enquête de la Cour sur les mesures nationales ne portera pas sur la violation des dispositions nationales, mais sur la conformité de ces mesures ordonnées par les autorités étatiques avec les dispositions du Statut de Rome et les droits de l’homme internationalement reconnus. Ainsi, une violation du droit national peut en même temps entrainer une violation d’un droit fondamental, c’est pourquoi il ne s’agit pas d’un contournement d’une disposition nationale mais d’une violation des principes sur la base desquels la CPI fonctionne. La Cour analysera la situation factuelle au niveau national uniquement pour vérifier dans quelle mesure les valeurs que la CPI cherche à protéger en vertu de l’article 21 du Statut, ont été atteintes. En tout état de cause, la Cour disposera d’un droit d’appréciation[37] sur l’existence de telles violations.
Qu’entendons-nous exactement par “droits de l’homme internationalement reconnus” ? S’agit-il des droits de l’homme en général, tels qu’ils sont décrits dans chaque législation nationale, ou bien doivent-ils être consacrés par un instrument international ? L’expression clé pour évaluer cette approche est la “reconnaissance internationale”[38], de sorte que non seulement les droits reconnus expressément verbis par le Statut de Rome bénéficieront d’une protection, mais aussi les droits qui entrent dans le large champ d’application approuvé par l’art. 21 para. 3 du Statut.[39] Cette phrase demeure également l’un des principaux points de repère de ce document. Pour interpréter la notion de “droits internationalement reconnus”, la CPI se réfère à la fois aux instruments internationaux adoptés par l’ONU[40] et d’autres organisations intergouvernementales[41] et à la jurisprudence des cours et tribunaux spécialisés dans la protection des droits fondamentaux. Si un droit prétendument violé est inscrit dans ces instruments[42] internationaux, la CPI établira également son statut de droit internationalement reconnu.
Comme mentionné ci-dessus, la Cour EDH est actuellement la juridiction internationale la plus connue dans ce domaine. Bien que le portefeuille de la CPI soit fortement axé sur le jugement d’individus du continent africain, le plus souvent, cette cour s’est tournée vers la jurisprudence de l’instance strasbourgeoise pour présenter une qualification appropriée aux situations impliquant les droits des individus. La pratique de la Cour EDH étant la plus étendue dans le domaine des droits de l’homme, le choix de la CPI est fondé sur des raisons pratiques. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme est impressionnante, et capable de fournir des directions d’interprétation portant sur l’obtention et l’utilisation de preuves.
N’étant pas en mesure d’être partie à la CEDH, la CPI n’est pas liée par ses décisions, mais celles-ci se sont avérées, dans la pratique, être des lignes directrices sur l’interprétation des “droits internationalement reconnus” et les conditions dans lesquelles l’ingérence des autorités nationales puisse être considéré légitime ou pas.[43]
Dans la mesure où un droit ne bénéficie pas d’une telle reconnaissance, aussi essentiel qu’il puisse s’avérer en droit national, sa violation ne peut donner lieu à l’applicabilité de l’article 69, para. (7), le droit national n’étant pour la CPI qu’une situation de fait.[44]Allant plus loin, pour ce qui est de la syntagme “non admissible”, il résulte du libellé de cette disposition que la règle d’exclusion doit s’appliquer si les conditions visées à l’article 69 sont réunies. Ainsi, contrairement à l’alinéa (4), le (7) n’autorise pas le pouvoir judiciaire discrétionnaire d’exclure les preuves entachées de la manière indiquée. Aussi claire que cette phrase puisse paraître à première vue, cette exclusion ” impérative ” a été contestée par la doctrine en raison de la présence des deux conditions attachées à l’hypothèse de l’alinéa (7) : la crédibilité et l’atteinte à l’intégrité, qui seront détaillées dans les paragraphes suivants. Divers auteurs ont fait valoir que la nature de ce paragraphe est en fait discrétionnaire.[45] Aucune disposition du Statut ou du Règlement ne prévoit une situation dans laquelle les preuves sont en soi irrecevables[46]. Ainsi, même la violation d’une disposition du Statut de la CPI ou d’un droit fondamental internationalement reconnu, aussi grave soit-elle, ne peut déclencher la règle de l’exclusion des preuves viciées que dans la mesure où cette violation produirait l’une des conséquences énoncées au paragraphe 1. (7)(a) et (b) : “la violation remet sérieusement en cause la crédibilité des preuves” et l’admission de telles preuves serait de nature à compromettre la procédure et à porter gravement atteinte à son intégrité”.
L’exactitude des preuves (la fiabilité) a été décrite dans la pratique comme “le fil d’or invisible qui traverse toutes les composantes de l’admissibilité”.[47] Dans l’approche de la pertinence et de la valeur probante, les preuves doivent être prima facie crédibles.[48] Au même temps, seules les vices qui mettent “substantiellement” en doute la crédibilité des preuves sont susceptibles d’entraîner l’exclusion, et ici la disposition met l’accent sur l’expression “mettre substantiellement en doute”[49], qui suggère qu’un seuil de gravité a été dépassé en termes de circonstances produites par le vice. Bien sûr, le Statut de Rome n’explique pas ce que nous entendons par violation grave, mais nous pouvons supposer que le témoignage d’une personne préalablement menacé par le procureur afin d’étayer une situation factuelle dictée peut jeter un doute sérieux sur la crédibilité des preuves. Les situations de témoignage résultant de la torture sont les plus courantes dans la pratique.[50] Ainsi, le Tribunal international pour l’ex-Yougoslavie a jugé, sur la question de la crédibilité des preuves, que : “les déclarations qui ne sont pas volontaires, mais qui résultent d’un comportement oppressif, ne peuvent pas passer le test de la règle 95″.[51] La règle 95 constitue la règle d’exclusion dans la version prévue par le Règlement de procédure et de preuve des Tribunaux internationaux ad hoc pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda.
Le para. 7(b) constitue un recours pour les situations où la preuve est en fait crédible mais où son admission au procès est susceptible de compromettre la procédure et de porter gravement atteinte à son intégrité. Ainsi, à première vue, l’effet dommageable viendrait de l’admission de la preuve elle-même, et non de la violation d’une disposition du Statut de la CPI ou d’un droit internationalement reconnu.[52] Pourtant, les spécialistes se sont demandé si la violation d’un droit fondamental devait ipso facto être de nature à porter atteinte à l’intégrité d’un procès.[53] En pratique, cette affirmation n’a pas été acceptée, l’opinion étant que toute violation d’un droit n’est pas automatiquement de nature à porter atteinte à l’intégrité du procès[54], mais seulement les violations qui sont considérées comme “graves” et qui portent atteinte à l’intégrité du procès dans son ensemble. A partir de ce moment, la question de savoir ce que le législateur entend par “atteinte grave à l’intégrité” a fait l’objet de nombreuses discussions.
En premier lieu, il a été considéré que la “gravité” de l’atteinte est donnée par la nature du droit enfreint. Bien que les instruments internationaux en la matière ne prévoient pas de hiérarchie des droits, en pratique, comme l’a observé la jurisprudence de la Cour EDH, la violation de certains droits s’est avérée avoir un impact plus important que la violation d’autres droits, l’exemple le plus éloquent étant l’interdiction de la torture par rapport à la violation d’autres droits. Dans certains systèmes juridiques, l’interdiction de la torture, considérée comme un “super” droit[55], entraîne automatiquement l’exclusion des preuves ainsi obtenues, quelles que soient les conséquences que cette inadmissibilité entraîne.[56] Dans la pratique des tribunaux ad hoc, la question de l’admissibilité des preuves obtenues par la torture n’a jamais été soulevée. Certains auteurs ont tenté de soutenir la thèse de l’exclusion automatique en invoquant certains raisonnements[57] de ces tribunaux, mais ceux-ci, trop généraux, n’ont pas pu réellement soutenir cette thèse. Ainsi, il n’existe aucune disposition dans la forme actuelle du Statut permettant l’exclusion automatique des preuves. En outre, la gravité et l’impact de la violation d’un droit particulier sont laissés à la discrétion des juges de la CPI.
Deuxièmement, il a été considéré que la gravité de l’infraction serait dictée non pas particulièrement par la nature du droit enfreint, mais par l’impact du vice sur le processus. Ces deux approches ont donné lieu à une certaine confusion quant au fondement de la règle d’exclusion. Les travaux préparatoires ont permis de clarifier cet aspect. Au moment de la rédaction des dispositions statutaires, il n’y avait pas de consensus sur ce qui déclenche exactement l’exclusion : la manière dont les preuves ont été obtenues (violation de la loi ou d’un droit fondamental) ou les effets que cette obtention engendre sur d’autres valeurs telles que la crédibilité et l’intégrité du procès.[58] La solution proposée était un compromis. A la suite de discussions informelles en mars-avril 1998, le comité préparatoire a accordé un certain poids à la manière dont les preuves sont recueillies (c’est-à-dire à la violation d’un droit fondamental), étant entendu que l’exclusion n’intervient que si l’une des deux conséquences négatives se produit. Cela a également amené à la conclusion que les deux conditions sont alternatives, fonctionnant en parallèle, de sorte que, comme mentionné dans les paragraphes précédents, les preuves pertinentes pour l’affaire peuvent toujours être exclues pour leur effet préjudiciable sur le procès.
Bien que l’article 69 al (7) prévoit l’exclusion obligatoire des preuves obtenues en violation d’un droit internationalement reconnu, en incluant les conséquences négatives des lettres (a) et (b), la règle se transforme en une appréciation discrétionnaire de l’exclusion de ces preuves.[59] L’ajout des deux conditions à l’hypothèse de l’alinéa 7 vient de créer une antithèse apparente. L’exclusion est obligatoire, mais seulement dans la mesure où les juges estiment qu’il y a une question de crédibilité ou d’atteinte à l’intégrité.
Après avoir fourni un large aperçu des conditions dans lesquelles l’article 69(7) s’applique, la question se pose de savoir dans quelles situations celles-ci ont fait l’objet de débats devant la CPI et dans quelle mesure les juges ont déclaré des preuves irrecevables en vertu de l’article 69. La source d’inspiration de cet article a été la jurisprudence elle-même, qui sera présentée dans les paragraphes suivants.
- L’affaire Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo-l’analyse de preuves entachées de vices
Une affaire qui a comporté des implications particulières pour la règle d’exclusion des preuves entachées est celle de Thomas Lubanga Dyilo, citoyen de la République démocratique du Congo (RDC), président de l’Union des patriotes congolais (UPC) et première personne à être condamnée devant la CPI pour avoir enrôlé et recruté des enfants de moins de 15 ans dans le conflit armé non international dans la région de l’Ituri. [60]
L’affaire est particulièrement complexe et donne lieu à des discussions intéressantes, mais aux fins du présent document, la décision de la Chambre préliminaire sur l’admissibilité des preuves revêt une importance particulière. Dès que la date de la première audience sur les charges a été confirmée, la Défense a soumis à la Cour des considérations concernant un certain nombre d’éléments de preuve qui n’auraient pas dû être admissibles en vertu du Statut de Rome, soit en raison de leur manque de valeur probante, soit parce qu’ils ont été obtenus en violation de droits internationalement reconnus.
Avant d’entrer dans une analyse détaillée de l’application des dispositions du Statut, il convient de garder à l’esprit le contexte factuel de l’affaire. Au moment de la confirmation des charges, en 2007, le Procureur a présenté à la Chambre préliminaire des preuves qui avaient été obtenues au niveau national en violation des règles de procédure congolaises.[61] Ainsi, au moment de la perquisition, le suspect Thomas Lubanga Dyilo était en détention par ordre des autorités nationales.[62] La défense a demandé que tout élément de preuve obtenu lors de cette perquisition soit irrecevable au procès, car “empoisonné” [63]par son obtention illégale. En ce qui concerne ces arguments de défense, la Cour les a rejetés, estimant qu’elle n’était pas liée par les décisions prises au niveau national. [64]
Cependant, la principale question soulevée par la défense dans cette affaire n’était pas la violation du droit national, mais l’obtention de preuves en violation d’un droit de l’homme internationalement reconnu, en l’occurrence le droit à la vie privée. [65]
En réalité, il n’y a pas d’organismes internationaux chargés de l’application des lois qui mènent des enquêtes devant la CPI. Dans la pratique, il n’a jamais été nécessaire non plus de créer un tel organe pour assumer l’entière responsabilité des poursuites. Les enquêtes devant la CPI sont menées dans le respect de la souveraineté des États. Pour bien mener son travail, la Cour coopère pleinement avec les autorités nationales de l’État dans lequel l’enquête doit être conduite. En vertu du Statut de Rome, les États sont tenus de coopérer “pleinement avec la Cour dans les enquêtes et les poursuites relatives aux crimes relevant de sa compétence”.[66] Cette coopération s’est avérée être un compromis entre la coopération horizontale prévue entre les Etats souverains et la coopération verticale[67] entre les Etats et les Tribunaux pénaux internationaux ad hoc. En vertu de l’article 93[68], intitulé “Autres formes de coopération”, la Cour peut formuler des demandes portant notamment sur l’obtention de preuves. Le libellé de l’article indique clairement que les États sont libres de s’y conformer, mais ne sont pas obligés de laisser au Bureau du Procureur une liberté absolue d’agir de quelque manière que ce soit pendant les enquêtes nationales.
Toujours pour des raisons de respect de la souveraineté des États, il existe un nombre limité de situations exceptionnelles dans lesquelles le Procureur de la CPI peut agir de manière indépendante[69], sans l’assistance des autorités nationales. Et même dans ces situations, l’État concerné peut fixer des limites que le Procureur doit respecter. Les doctrinaires ont exprimé leur mécontentement quant aux pouvoirs limités du Bureau du Procureur dans les enquêtes nationales. Ils ont fait valoir qu’une participation plus active de sa part aurait mieux garanti le respect des dispositions du Statut et la conformité avec la norme internationale en matière de respect des droits fondamentaux.[70] Dans ces conditions, une grande partie des enquêtes sur les crimes internationaux sont menées au niveau national sans l’intervention du Bureau du Procureur. Le Procureur n’ayant pas participé à la collecte des preuves, des débats ont été soulevés quant à la pertinence de l’obtention illégale de preuves au niveau national, la CPI pouvant prétendre à une éventuelle innocence et n’étant que le bénéficiaire du “fruit de l’arbre empoisonné[71]“.
En l’espèce, la défense a cherché à justifier l’exclusion de la preuve viciée précisément comme une mesure visant à discipliner et à dissuader les comportements illégaux et irréguliers dans l’obtention des preuves, la violation étant d’autant plus grave, vu qu’elle est supervisée par un fonctionnaire de la CPI. Constatant que la responsabilité d’un comportement irrégulier au moment du prélèvement incombe aux autorités nationales chargées de l’enquête, la Cour a estimé qu’elle ne pouvait en aucun cas être tenue responsable pour des violations commises.[72] En outre, il a été constaté qu’il n’y avait pas de lien de causalité entre l’auteur (qu’il s’agisse d’un représentant du ministère public ou des autorités nationales) et la règle excluant les preuves viciées, de sorte que les arguments de la défense à cet égard ont été rejetés.
Afin de déclencher l’applicabilité de l’art. 69 para. (7), il était nécessaire d’identifier une violation soit d’une disposition du Statut, soit d’un droit fondamental internationalement reconnu. Comme la recherche a été menée au niveau national et que la Cour n’est pas concernée par les violations du [73]droit interne, il n’est pas question d’une violation d’une disposition du Statut de Rome. Ainsi, la Défense devait prouver devant la CPI non pas la violation d’une disposition nationale, mais la violation d’un droit fondamental. En effectuant une perquisition illégale, les autorités ont pénétré illégalement dans le domicile du suspect en violation de son droit à la vie privée. La Cour a ensuite identifié les instruments qui consacrent ce droit, notamment la Convention européenne des [74]droits de l’homme, la Convention internationale sur les [75]droits civils et politiques et la Convention interaméricaine des [76]droits de l’homme, et a conclu que le droit à la vie privée est reconnu au niveau international.
L’analyse suivante s’est concentrée sur la légitimité de l’ingérence de l’autorité publique dans l’application de ce droit, car le droit à la vie privée n’est pas connu comme un droit absolu. Pour être légitime[77], l’ingérence des autorités étatiques dans l’exercice des droits protégés par l’article 8 doit être prévue par la loi, poursuivre un [78]but légitime et apparaître nécessaire dans une société démocratique.[79] La jurisprudence européenne a ajouté une quatrième condition, à savoir que l’ingérence doit être proportionnée à l’objectif poursuivi.[80] Selon les orientations de la Cour EDH[81] concernant l’article 8, les mesures impliquant l’entrée dans des domiciles privés doivent être légales, ce qui implique le respect de la procédure juridique nationale[82] et des garanties prévues par la loi[83]. À titre d’exemples d’ingérences légitimes, le guide prévoit les situations suivantes : actions intentées par l’autorité nationale de la concurrence pour garantir une [84]concurrence loyale, répression de l’[85]évasion fiscale, recherche de preuves circonstancielles et matérielles dans le cadre de procédures pénales, concernant par exemple les infractions de faux, d’abus de confiance et d’émission de chèques sans provision, le trafic[86] de drogue et le commerce illégal de médicaments.[87] En ce qui concerne les perquisitions, la Cour européenne a rappelé qu’elles constituent le plus souvent une ingérence légitime dans la vie privée d’une personne si elles visent “le déplacement de certains objets afin de recueillir des preuves matérielles visant la commission d’infractions”[88]. Dans ces situations, elle a estimé que c’est à la législation nationale à qui incombe la responsabilité primaire de fournir toutes les “garanties contre d’éventuels abus de la part des autorités compétentes.” [89]
La Cour a rappelé qu’un mandat de perquisition doit être accompagné d’une liste de limitations, afin que l’ingérence des autorités dans la vie privée d’une personne ne soit pas potentiellement illimitée et donc disproportionnée. Le libellé du mandat doit préciser l’objectif du mandat (pour garantir que la perquisition se concentre strictement sur les infractions faisant l’objet de l’enquête) et les critères de sa mise en œuvre (pour faciliter le contrôle de l’ampleur de l’opération).[90] Un mandat rédigé en termes généraux et dépourvu d’informations claires sur le mécanisme d’enquête et les objets à saisir risque d’accroitre aux autorités nationales des pouvoirs trop larges, qui mettent en péril les droits des parties. [91]
En principe, lorsque la question de la violation du droit à la vie privée se pose, ce que la Cour de Strasbourg recherche précisément, c’est le respect par l’État du principe de proportionnalité. Une perquisition policière peut être considérée comme disproportionnée lorsque la mesure n’est pas précédée de mesures de précaution disponibles et raisonnables, comme l’absence de vérification préalable de l’identité des résidents des lieux perquisitionnés, ou lorsque l’intervention des autorités a été excessive.[92] Une intrusion de la police à 6 heures du matin, sans motif adéquat, au domicile d’une personne absente au moment de l’intervention, qui n’était en fait pas l’auteur mais la victime, s’est avérée inutile dans une société démocratique.[93] La Cour a également conclu qu’il y eu une violation de l’article 8 dans le cas de perquisitions et de saisies de domiciles privés par rapport avec des actes prétendument commis par une autre personne, qui n’était pas le principal suspect dans l’affaire.[94]
Prenant comme référence pertinente et nécessaire la jurisprudence des juridictions internationales spécialisées dans la protection des [95]droits fondamentaux, en particulier la jurisprudence de la Cour EDH[96], la CPI a procédé à l’analyse de la proportionnalité de la mesure ordonnée par les autorités.
Afin de constater une violation du principe précité, il était nécessaire de détailler la manière dont la perquisition a été menée : “des centaines de documents ont été saisis, notamment de la correspondance, des photographies, des invitations, des textes législatifs, des rapports, des agendas et des “informations personnelles”.” Il n’existe aucun moyen de déterminer la pertinence, le cas échéant, de l’un des documents saisis par les autorités congolaises.”[97] Compte tenu de la saisie générale et indiscriminée d’un grand nombre d’objets qui ne figuraient pas initialement sur la liste établie par les autorités, la Chambre préliminaire a estimé que la mesure était disproportionnée, même si elle avait été supervisée par le procureur désigné de la CPI.[98]
Ayant constaté que la mesure ordonnée par les autorités nationales n’était pas proportionnée, il était nécessaire d’analyser dans quelle mesure l’art. 69 du Statut de Rome est applicable, ce qui fait l’objet du présent article.
En ce qui concerne la première conséquence potentielle prévue par l’art. 69 al. (7), les juges ont admis la possibilité que certains modes de collecte des preuves, tels que “le témoignage d’une personne sous pression”, puissent créer le danger que ce témoignage ne reflète pas des faits qui se sont réellement produits ou qu’il présente une réalité qui omet des aspects pertinents. La Chambre préliminaire a cherché à préciser que toute violation d’un droit fondamental ne met pas forcément en doute la crédibilité des preuves ainsi obtenues. La crédibilité des preuves est affectée en particulier dans le cas de déclarations, lorsque la personne concernée est contrainte d’admettre des situations factuelles qui ne sont pas conformes à la réalité par crainte de subir des conséquences de la part de la personne qui la contraint. Dans le cas de mesures telles que les saisies/perquisitions spéciales, les objets saisis ne sont pas altérés du simple fait d’une violation des dispositions nationales. [99]
Indépendamment de la pertinence des preuves obtenues, le para. (b) de l’al. (7) ne concerne pas le contenu de la preuve elle-même, mais l’impact de son administration en l’espèce, étant donné qu’elle soit obtenue à la suite de la violation d’un droit fondamental reconnu internationalement. Comme aucun consensus n’a été atteint sur cette question dans la jurisprudence internationale en matière de droits de l’homme, la CPI a cherché à trouver un juste équilibre entre les droits de l’accusé et les attentes de la communauté internationale. Ainsi, elle n’a pas considéré comme justifiant l’exclusion que les situations de “violations graves”.[100] Dans l’affaire Schenk c. Suisse, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé qu‘”il n’est pas exclu, en principe et dans l’abstrait, que des preuves obtenues illégalement soient admissibles, et l’exclusion ne devrait être ordonnée que dans la mesure où leur administration rend le procès dans son ensemble inéquitable. “[101] Dans une expression plus agréable, “l’admission de toute preuve pertinente est requise, sauf si la nécessité d’assurer un procès équitable l’emporte sur la nécessité de l’administrer.” [102]
Se fondant sur la vision doctrinale, la jurisprudence des tribunaux internationaux ad hoc [103]et celle des juridictions spécialisées dans la protection des droits fondamentaux, la Chambre préliminaire a considéré que la preuve était pertinente pour l’affaire, que la violation du droit à la vie privée n’était pas d’une gravité considérable et que son acceptation à ce stade de la procédure n’empêchait la première instance de les prendre en compt[104]e.
Dans le cadre de l’appel de la défense contre la décision de la Chambre préliminaire, les juges ont à nouveau examiné la manière dont la perquisition a été menée, en examinant tour à tour la pertinence prima facie, la valeur probante et l’équilibre entre la valeur probante et l’effet préjudiciable que la perquisition pourrait avoir.[105] Finalement, la première instance a confirmé la décision de la chambre préliminaire et a admis les preuves dans l’affaire. Il n’a pas été constaté qu’il était nécessaire d’exclure les preuves entachées d’une violation d’un droit internationalement reconnu.
Cette solution a suscité de nombreuses discussions et la question a été légitimement posée de savoir dans quelle mesure la violation du droit à la vie privée soulève la question de l’inadmissibilité. Théoriquement, les preuves obtenues par une perquisition illégale ne peuvent être exclues que si l’obtention de ces preuves perturbe l’ensemble de la procédure, de sorte que l’exclusion serait la seule solution pour garantir un procès équitable. Qu’est-ce que cela signifie en réalité ? En interprétant les arguments de la CPI, on peut déduire qu’un élément de preuve obtenu illégalement peut avoir un impact considérable sur le procès dans une situation où il serait le seul fondement d’une condamnation : un dispositif électronique saisi en l’absence d’un mandat de perquisition incorporant une admission des faits dont le suspect est accusé. Comme il s’agit du seul élément de preuve sur lequel la solution du tribunal pourrait être fondée, l’impact est substantiel. Dans une telle situation, cependant, la présence d’autres éléments de preuve à l’appui de la condamnation atténuerait la gravité de la violation du droit à la vie privée et, conformément au raisonnement de la CPI, n’entraînerait plus l’exclusion des preuves, du dispositif en question- comme par exemple : en plus de l’appareil en question, il y aurait également 2 témoins déclarant avoir une connaissance directe des déclarations du suspect. Selon nous, le problème persiste toutefois, vu qu’à la base de cette solution, les preuves viciées seront également prises en compte. Il n’y a aucune garantie que le matériel enregistré n’a pas joué un rôle important dans l’issue d’un procès. Elles s’apparentent aux situations dans lesquelles un juge national découvre l’auteur d’un meurtre par le biais de preuves viciées qu’il doit déclarer irrecevables en droit. La preuve ne fera plus partie du corps de la preuve, mais il serait “naïf” de penser qu’elle quitte le fonds intérieur du juge.
Nous pouvons donc affirmer, en première conclusion, que, bien que la règle d’exclusion soit impérative, il appartient aux juges de déterminer dans quelle mesure la violation est grave et, au même temps, dans quelle mesure cette violation cause un préjudice considérable à l’équité du procès.
La jurisprudence de la Cour EDH soutient l’interprétation du concept de droits internationalement reconnus et fournit des lignes directrices sur l’admissibilité des preuves altérées à travers sa pratique. Dans le cadre du pourvoi contre l’arrêt de la chambre préliminaire, la première instance a donné tour à tour des exemples de jugements qui posent la question de la violation de l’article 8 et de la mesure dans laquelle l’ingérence dans l’exercice du droit à la vie privée était ou non justifiée et proportionnée. [106]
Ainsi, dans l’affaire Camenzind c. Suisse, la Cour européenne des droits de l’homme a pris note de la nécessité d’ordonner des perquisitions et des saisies, en indiquant que ” au cas par cas, il convient d’examiner dans quelle mesure les motifs qui sous-tendent ces mesures sont pertinents et suffisants et si leur ordonnancement était conforme au principe de proportionnalité. “[107] M. Camenzind avait été soupçonné d’utiliser un téléphone sans fil sans autorisation, en violation des dispositions nationales suisses. Comme il y avait déjà des enregistrements audios de ses conversations dans les archives de la police, le suspect a estimé qu’il était inapproprié de fouiller son domicile pour prendre physiquement possession de l’objet. La Cour EDH a, en revanche, estimé que les autorités ont respecté les dispositions nationales. Même en l’absence d’un mandat de perquisition, elle a considéré que le consentement du suspect au moment de la perquisition et sa présence à toute l’opération couvraient l’absence de mandat. Ainsi, la Cour a accepté comme justifiée l’intervention des autorités afin de présenter à la juridiction nationale le corpus delicti comme preuve du crime. L’ingérence des autorités dans l’exercice du droit à la vie privée du requérant a été jugée justifiée et proportionnée.
Dans l’affaire Miailhe c. France, la Cour a estimé que la saisie sans discrimination d’un grand nombre (” des milliers “) d’objets sans rapport avec l’objet de l’affaire était disproportionnée et qu’il était nécessaire de restituer ceux qui n’avaient pas fait partie de l’objet du mandat. [108]
Il résulte donc de cette analyse que le CPI a également emprunté d’importantes jugements de la Cour EDH sur les limitations des droits de l’homme, la Chambre de première instance reproduisant donc ici la jurisprudence de la Cour EDH portant sur l’article 8 de la Convention EDH (c’est-à-dire les arrêts Camenzind, Miailhe et Stefanov) et son analyse justificative fondée sur les exigences de motifs pertinents et suffisants et d’une ingérence proportionnée. La Chambre de première instance a estimé que la violation d’une norme internationalement reconnue en matière de droits de l’homme dans la collecte de preuves était compensée par les facteurs suivants, conformément à l’article 69 al. (7) du Statut de la CPI : (i) la preuve était toujours pertinente, nonobstant l’illégalité ; (ii) la violation du droit au respect de la vie privée était essentiellement imputable aux autorités congolaises ; (iii) la violation n’était pas grave ; et (iv) le droit au respect de la vie privée n’était pas celui de l’accusé. La Chambre de première instance a ainsi confirmé une décision antérieure rendue par la Chambre préliminaire qui avait souligné la nature nuancée du droit au respect de la vie privée par l’approbation de la technique de proportionnalité façonnée par la CEDH.
La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme concernant les perquisitions et les saisies spéciales au domicile privé est vaste et donne lieu à de nombreux débats doctrinaux. Toutefois, aux fins du présent article, l’accent est mis sur les cas étudiés par la CPI en vue d’appliquer le test de proportionnalité aux mesures ordonnées par les autorités au domicile de M. Lubanga Dyilo. Sur le plan théorique, la Cour a repris les concepts et suivi les méthodes et mécanismes appliqués par la Cour de Strasbourg. Toutefois, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme ne peut contraindre la Cour pénale à adopter la même interprétation pour juger ses propres affaires. Cela ne peut cependant pas être critiqué en raison de la différence majeure entre les deux juridictions. Outre les différentes branches du droit qu’ils traitent, nous devons garder à l’esprit que la Cour européenne des droits de l’homme ne remet pas en cause une poursuite et un procès pénaux. La Cour de Strasbourg a pour mandat d’examiner dans quelle mesure une affaire nationale déjà réglée a échoué à protéger un droit fondamental de l’individu. En revanche, la CPI est concernée non seulement par l’impératif de respecter les droits de l’accusé, mais aussi par l’impératif de mener un procès qui exige le respect de toute une série de procédures. La CPI a donc l’obligation de trouver un juste équilibre entre les différentes valeurs fondamentales qu’elle s’est engagée à protéger.[109]
6. Conclusion
Il résulte qu’en matière de preuves, même si la règle d’exclusion soit impérative, il appartient toujours aux juges de déterminer dans quelle mesure la violation est grave et, au même temps, dans quelle mesure cette violation a causé un préjudice considérable à l’équité du procès.
En observant les controverses sur l’exclusion des preuves altérées dans la pratique des tribunaux nationaux, il est facile de supposer que ces controverses occuperont également une place sur la plate-forme du droit pénal international à l’avenir. Cependant, les futures discussions de la CPI sur la règle d’exclusion ne seront pas uniquement basées sur une approche méthodologique améliorée de la Cour, mais aussi sur le développement de la relation dynamique entre le droit international visant la procédure pénale et le droit international des droits de l’homme.[110] Bien que le corpus de lois de la CPI soit beaucoup plus détaillé que les statuts des tribunaux pénaux internationaux qui l’ont précédée, la Cour bénéficie toujours d’un soutien législatif minimal pour la conduite des enquêtes. Par conséquent, l’interprétation de la règle d’exclusion des preuves entachées de vices devant la CPI dépend de manière significative du contenu que le contexte international attribue à la notion de droits internationalement reconnus.
* Maitre de conférences, Faculté de Droit, Université de Bucarest, e-mail : elena.lazar@drept.unibuc.ro. Les opinions exprimées dans cet article sont uniquement celles de l’auteur et n’engagent pas l’institution à laquelle elle appartient.
[1] Petra Viebig – Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 58.
[2] Corneliu Bîrsan – Convention européenne des droits de l’homme, Commentaire des articles, 2e édition, Ch. Beck, Bucarest 2010, p. 12.
[3] Petra Viebig – Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 59.
[4] Corneliu Bîrsan – Convention européenne des droits de l’homme, Commentaire des articles, 2e édition, Ch. Beck, Bucarest 2010, p. 1601 ; Carmen Achimescu, Principiul subsidiaritatii in domeniul protectiei europene a drepturilor omului, C.H. Beck, 2015, p. 108.
[5] CEDH, Jalloh c. Allemagne, arrêt du 11 juillet 2006 (requête n° 54810/00), para. 94 et 95; Khan c. Royaume-Uni, décision du 12 mai 2000 (requête n° 35394/97), para. 34 ; Schenk c. Suisse, décision du 12 juillet 1988 (requête n° 10862/84), para. 46.
[6] Corneliu Bîrsan – Convention européenne des droits de l’homme, Commentaire des articles, 2e édition, Ch. Beck, Bucarest 2010, Art. 6, p. 356.
[7] Art. 6, Convention européenne des droits de l’homme.
[8] Art. 13, Convention européenne des droits de l’homme.
[9] Carmen Achimescu, Le retour des Black Sites devant le juge de Strasbourg, Romanian Journal of International Law 19/2018.
[10]CEDH, Harutyunyan c. Arménie, décision du 28 juin 2007 (requête n° 36549/03), para. 66.
[11]CEDH, Khan c. Royaume-Uni, décision du 12 mai 2000 (requête n° 35394/97), para. 40.
[12]CEDH, Khan c. Royaume-Uni, opinion dissidente du juge Loucaides (requête n° 35394/97) ;Gaede K (2009) Beweisverbote zur Wahrung des fairen Strafverfahrens in der Rechtsprechung des EGMR insbesondere bei verdeckten Ermittlungen, Juristische Rundsch, p. 494 ; Carmen Achimescu, Valoarea interpretativă a noțiunii de demnitate umană în jurisprudența CEDO, AUB Drept 2016, p.136.
[13] Petra Viebig, Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 173.
[14] Article 3, Convention européenne des droits de l’homme.
[15] Article 6, Convention européenne des droits de l’homme.
[16] CEDH, Jalloh c. Allemagne, décision du 11 juillet 2006 (requête n° 54810/00), para. 105 : ” Les éléments de preuve à charge – qu’il s’agisse d’aveux ou de preuves réelles – obtenus à la suite d’actes de violence ou de brutalité ou d’autres formes de traitement pouvant être qualifiés de torture, ne devraient jamais être invoqués comme preuve de la culpabilité de la victime, quelle que soit leur valeur probante. ” Voir également Gäfgen c. Allemagne, Cour européenne des droits de l’homme, décision du 1er juin 2010 (requête n° 22978/05), paragraphe 167.
[17] Art. 15, Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, signée le 10 décembre 1984 et entrée en vigueur le 26 juin 1987.
[18] Résolution de l’ONU AG 32/62 du 3 décembre 1977.
[19] GerhardWerle, Völkerstrafrecht, 3e édition. Mohr Siebeck, Tübingen, 2012, para. 154
[20] Art. 21 para. (1) lit. (b), Statut de Rome.
[21] Art. 21 para. (3), Statut de Rome.
[22] Comme par exemple, le Tribunal pénal international de l’ex Yougoslavie.
[23] Art. 55, Statut de Rome.
[24] Art. 64 para. (2), Statut de Rome.
[25] Art. 69 al. (4), Statut de Rome.
[26] Otto Triffterer and Kai Ambos (eds), The Rome Statute of the International Criminal Court, A Commentary, Third Edition, p. 1736, para. 41.
[27] Petra Viebig, “Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court”, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 105.
[28]CPI (Chambre de première instance), Le Procureur c. Katanga, Décision relative à l’admission de pièces provenant de la ” table du bar “, 17 décembre 2010, para. 17
[29]CPI, Katanga et al., CPI-01/04-01/07, Décision de confirmation des charges, 30 septembre 2008, para. 77.
[30] CPI, Procureur c. Delalic’ et al, IT-96- 21, Décision sur la requête de l’accusation pour l’admissibilité de la preuve, 19 janvier 1998, para. 17.
[31]TPIY (Chambre de première instance), Le Procureur c. Brđanin, Décision sur l'”Objection à l’interception de preuves” de la Défense, 3 octobre 2003, paragraphe 68 : “[…] estime qu’il est nécessaire, même à ce stade, d’être convaincu qu’il existe une indication prima facie de fiabilité, faute de quoi il lui incomberait de les exclure [les communications interceptées] d’emblée” ; Voir également TPIR (Chambre de première instance), Le Procureur c. Karemera et al. , Décision sur la requête du Procureur pour l’admission de certaines pièces dans le matériel probatoire, décision du 25 janvier 2008, para 17.
[32] CPI (Chambre de première instance), Le Procureur c. Katanga, Décision relative à l’admission de pièces provenant de la “bar table “, 17 décembre 2010, para. 13.
[33] Art. 69, para. (7) : “Les preuves obtenues par un moyen qui viole le présent Statut ou les droits de l’homme internationalement reconnusne sont pas recevables :
(a) si la violation remet sérieusement en question la crédibilité des preuves ; ou
(b) si l’admission de ces preuves est de nature à porter préjudice à la procédure et à en compromettre sérieusement l’intégrité.”.
[34] CPI (Chambre de première instance) CPI-01/04-01/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision relative à l’admission de pièces provenant de la “bar table “, 24 juin 2009, para. 34 et 43 ; Voir également Petra Viebig, “Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court”, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 109 ; Voir également Le Procureur c. Katanga, Décision relative à l’admission de pièces provenant de la “bar table “, 17 décembre 2010, para. 39.
[35] États-Unis c. Lee, Cour d’appel des États-Unis pour le deuxième district, décision du 7 juin 2013, n° 12-0088-cr. ; voir également Scharf Michael, Tainted provenance : when, if ever, should torture evidence be admissible ? 2008, p. 152; Ambos Kai, The transnational use of torture evidence, 2010, p. 373.
[36] Petra Viebig, “Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court”, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 181
[37] Otto Triffterer and Kai Ambos (eds), The Rome Statute of the International Criminal Court, A Commentary, Third Edition, p. 1745, para. 60.
[38] Idem, p. 1747, para. 65.
[39] “L’application et l’interprétation de la loi, telles que prévues par le présent article, doivent être conformes aux droits de l’homme internationalement reconnus et exemptes de toute discrimination fondée sur des motifs tels que le sexe tel que défini à l’article 7, paragraphe 3, l’âge, la race, la couleur, la langue, la religion ou la croyance, les opinions politiques ou autres, l’origine nationale, ethnique ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.”.
[40] La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, signée le 10 décembre 1984 et entrée en vigueur le 26 juin 1987.
[41] William A. Schabas, The International Criminal Court, A Commentary on the Rome Statute, Deuxième édition, Oxford University Press, p. 1095.
[42] Friman Hakan, Droits des personnes suspectées ou accusées d’un crime. Dans: Lee R (ed) The International Criminal Court: the making of the Rome Statute: issues, negotiations, results, Kluwer Law International, La Haye, 1999, p.248.
[43] Petra Viebig, “Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court”, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 174
[44] Article 69(8), Statut de Rome.
[45] William A. Schabas, The International Criminal Court, A Commentary on the Rome Statute, Second Edition, Oxford University Press, p. 1089.
[46] CPI, Bemba, Décision en vertu de l’art. 61(7) (a) et (b) du Statut de Rome sur les charges du Procureur contre Jean-Piere Bemba Gombo, 15 juin 2009, para. 46
[47] Delalić et al. (IT-98-21-T), Décision sur la recevabilité de la pièce 155, 19 janvier 1998, para. 32. Voir également William A. Schabas, An Introduction to the International Criminal Court, quatrième édition, Cambridge, p. 312.
[48] William A. Schabas, An Introduction to the International Criminal Court, quatrième édition, Cambridge, p. 312; William A. Schabas – The International Criminal Court, A Commentary on the Rome Statute, deuxième édition, Oxford University Press, p. 1088.
[49] Otto Triffterer and Kai Ambos (eds), The Rome Statute of the International Criminal Court, A Commentary, Third Edition, p. 1748, para. 68.
[50]Petra Viebig, “Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court”, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 132.
[51]TPIY (Chambre de première instance), Procureur c. Stakic’, Ordonnance provisoire sur les normes régissant l’admission des preuves et l’identification, 25 février 2002, para. 8.
[52] Otto Triffterer and Kai Ambos (eds), The Rome Statute of the International Criminal Court, A Commentary, Third Edition, p. 1748, para. 69.
[53] Alexander Zahar, Goran Sluiter, International criminal law: a critical introduction. Oxford UniversityPress, Oxford, 2008, p. 382; voir également SalvatoreZappalà., Human rights in international criminal proceedings. Oxford University Press, Oxford, 2003, p. 152.
[54] CPI (Chambre préliminaire) CPI 601/04601/06, Le Procureur c. Lubanga, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para 84 ; voir également CPI (Chambre préliminaire), Le Procureur c. Mbarushimana, Décision sur la confirmation des charges, 16 décembre 2011, para 61.
[55]Petra Viebig, “Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court”, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 172.
[56]Chambre des Lords, A. et autres c. Secretary of State for the Home Department, décision du 8 décembre 2005, [2005] UKHL 71, paragraphe 1. 37, 38. 51.
[57] Voir Alamuddin, Collection of evidence. Dans: Khan K, Buisman C, Gosnell C (eds) Principles of evidence in international criminal justice. Oxford University Press, Oxford, 2010, p. 303, citant TPIR (Chambre premier instance), Le Proureur c. Nchamihigo, Décision relative à la demande du Procureur d’admettre comme preuve la transcription de l’entretien de l’accusé en tant que suspect et la demande de la Défense de retenir la preuve, 5 février 2007, para 21 : Il est bien établi que la déclaration d’un suspect ne sera pas admise comme preuve à son procès si ses droits pendant l’enquête n’ont pas été respectés.” De même, voir également David McKeever, Evidence obtained through torture before the Khmer Rouge tribunal unlawful pragmatism? J Int Crim Justice 8:615-6302010, 2010, p. 627, citant TPIY, (Chambre premier instance), Le Procureur. Delalic’ et al, Decision sur Hazim Delic’s Motions en conformité avec la Règle 73),1er septembre 1997, para 15:. ” Le principe selon lequel les aveux faits par des accusés en l’absence de leur volonté et résultant de menaces, d’incitations ou de l’espoir d’obtenir une faveur de la part de personnes en position d’autorité sont irrecevables en tant que preuves, est bien établi […]”.
[58]Otto Triffterer and Kai Ambos (eds), The Rome Statute of the International Criminal Court, A Commentary, Third Edition, p. 1721, para. 16.
[59]Petra Viebig, “Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court”, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 107.
[60] CPI (Chambre préliminaire) CPI 601/04601/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para. 258 ; Voir également Bogdan Aurescu, Ion Galea – Drept International Public, Scurta culegere de jurisprudenta pentru seminar, Editura Hamangiu 2018.
[61] Code de procédure pénale congolais, art. 33 : “La perquisition ne peut être effectuée qu’en présence de l’accusé/suspect du crime en question et en présence du propriétaire du logement, à moins que ces personnes ne soient pas présentes ou ne veuillent pas y prendre part.”
[62] CPI (Chambre préliminaire) CPI 601/04601/06, Le Procureur c. Lubanga, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para. 62.
[63] Doctrine du fruit de l’arbre empoisonné, Silverthorne Lumber Co, Inc. et al. v. United States.
[64] Art. 69 para. (8), Statut de Rome : ” Lorsqu’elle se prononce sur la pertinence ou l’admissibilité d’éléments de preuve recueillis par un État, la Cour ne se prononce pas sur l’application du droit national de cet État. “
[65] CPI (Chambre préliminaire) CPI 601/04601/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para. 74.
[66] Art. 86, Statut de Rome
[67] TPIY (Chambre d’appel), Procureur c. Blaškic’, Arrêt sur la requête de la République de Croatie pour la révision de la décision de la Chambre de première instance II de juillet 1997, 29 octobre 1997, para. 47 et 50.
[68] Petra Viebig, Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 100.
[69] Art. 99 para. (4), Statut de Rome : ” Sans préjudice des autres articles du présent chapitre, lorsque cela est nécessaire pour l’exécution effective d’une demande qui peut être exécutée sans recourir à des mesures coercitives, notamment lorsqu’il s’agit d’entendre ou de recueillir les déclarations d’une personne agissant de son plein gré, y compris en dehors de la présence des autorités de l’État partie requis, lorsque cela est déterminant pour la bonne exécution de la demande, ou lorsqu’il s’agit d’inspecter un site public ou un autre lieu public sans le modifier, le procureur peut exécuter l’objet de la demande directement sur le territoire de l’État […]”
[70] Petra Viebig, Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 103.
[71] CPI (Chambre de première instance) CPI-01/04-01/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision relative à l’admission de pièces provenant de la “bar table “, 24 juin 2009, para. 45.
[72] CPI (Chambre de première instance) CPI-01/04-01/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision relative à l’admission de pièces provenant de la “bar table “, 24 juin 2009, para. 46.
[73] Art. 31 Constitution de la République démocratique du Congo.
[74] Art. 8, Convention européenne des droits de l’homme.
[75] Art. 17, Convention internationale sur les droits civils et les politiques civiles.
[76] Art. 11, Convention interaméricaine des droits de l’homme.
[77] Art. 8 para. 2, Convention européenne des droits de l’homme.
[78] CEDH, Smirnov c. Russie, arrêt du 7 juin 2007, (requête n° 71362/01), para. 40.
[79]CEDH, Camenzind c. Suisse, arrêt du 16 décembre 1997, (requête n° 21353/93), paragraphe. 47.
[80]CEDH, Miailhe c. France, arrêt du 25 février 1993, (requête n° 12661/97), para 39 ; Iliya Stefanov c. Bulgarie, arrêt du 22 mai 2008, requête n° 65755/01, para. 42.
[81] Guide sur l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, Droit au respect de la vie privée et familiale, première édition, p. 58.
[82] CEDH, L.M. c. Italie, arrêt du 8 février 2005, (requête n° 60033/00), para. 29, 31.
[83] CEDH, Panteleyenko c. Ukraine, arrêt du 29 juin 2006, (requête n° 11901/02), para. 50-51.
[84] CEDH, Delta Pekárny a.s. c. République tchèque, arrêt du 2 octobre 2014, (requête n° 97/11), para. 81.
[85] CEDH, K.S. et M.S. c. Allemagne, arrêt du 6 octobre 2016, (requête n° 33696/11), para. 48
[86] CEDH, Ișıldak c. Turquie, arrêt du 30 septembre 2008, (requête n° 12863/02), para. 50.
[87] CEDH, Wieser et Bicos Beteiligungen GmbH c. Autriche, arrêt du 16 octobre 2007, (requête n° 74336/01), para. 55.
[88] Corneliu Bîrsan – Convention européenne des droits de l’homme, Commentaire des articles, 2e édition, Ch. Beck, Bucarest 2010, Art. 8, para. 202, p. 711.
[89] Corneliu Bîrsan, Convention européenne des droits de l’homme, Commentaire des articles, 2e édition, Ch. Beck, Bucarest 2010, Art. 8, para. 202, p. 711.
[90] Guide sur l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, Droit au respect de la vie privée et familiale, première édition, p. 58.
[91] CEDH, Van Rossem c. Belgique, arrêt du 9 décembre 2004, (requête n° 41872/98), para.. 44-50 ; Bagiyeva c. Ukraine, CEDH, arrêt du 28 avril 2016, requête n° 41085/05, para. 52.
[92] CEDH, Vasylchuk c. Ukraine, arrêt du 13 juin 2013, (requête n° 24402/07), para. 80 et 84
[93]CEDH, Zubaľ c. Slovaquie, arrêt du 9 novembre 2010, (requête n° 44065/06), para. 41-45
[94] Buck c. Allemagne, Cour européenne des droits de l’homme, arrêt du 28 avril 2005, requête n° 41604/98, paragraphe 1. 52.
[95] CPI (Chambre préliminaire) C601/04601/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para. 73.
[96] Carmenzind c. Elvetiei, arrêt du 16 décembre 1997, requête n° 21353/93, paragraphe 2. 45.
[97] CPI (Chambre préliminaire) CPI 601/04601/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para. 80.
[98] Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, CPI-01/04-01/06, Chambre de première instance, Décision relative à l’admission de pièces provenant de la ” table du bar “, 24 juin 2009, Para. 3.
[99] CPI (Chambre préliminaire) C601/04601/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para. 85.
[100] CPI (Chambre préliminaire) C601/04601/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para. 86.
[101] CEDH, Schenk c. Suisse, arrêt du 12 juillet 1988, requête n° 10862/84, para. 46 ; voir également Saunders c. Royaume-Uni, arrêt du 17 décembre 1996, requête n° 19187/91 ; Khan c. Royaume-Uni, arrêt du 12 mai 2000, requête n° 35394/97 ; et Van Mechelen et autres c. Pays-Bas, arrêt du 23 avril 1997, requête n° 21363/93. Le même raisonnement a été suivi par la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans l’affaire Ivcher Bronstein, arrêt du 6 février 2001. Les cas de Castillo Páez, Loayza Tamayo et Paniagua vont également dans le même sens.
[102] Salvatore Zappala, Human Rights in International Criminal Proceedings, Oxford University Press, 2003, p. 149.
[103]Le Procureur c. Delalić et al, IT-96-21, Décision sur la requête de l’accusation concernant l’admissibilité des preuves, 19 janvier 1998; Voir également la décision orale du juge May du 2 février dans l’affaire Le Procureur c. Kordić et Cerkez,. IT-95-14/2-T, p. 13694 du procès-verbal des audiences, dans lequel il estime que “même si l’illégalité était établie […] [nous] sommes parvenus à la conclusion que […] les preuves obtenues par l’écoute des appels téléphoniques d’un ennemi au cours d’une guerre ne relèvent certainement pas des comportements visés par la règle 95. Ce n’est pas contraire à l’intégrité de la procédure et cela ne la compromettrait certainement pas.”
[104] CPI (Chambre préliminaire) C601/04601/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para. 90.
[105] CPI (Chambre de première instance) CPI-01/04-01/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision relative à l’admission de pièces provenant de la “bar table “, 24 juin 2009, para. 4.
[106] CPI (Chambre de première instance) CPI-01/04-01/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision relative à l’admission de pièces provenant de la “bar table “, 24 juin 2009, para. 22-24.
[107] CEDH, Camenzind c. Suisse, precitée.
[108] CEDH, Miailhe c. France, arrêt du 25 février 1993, (requête n° 12661/97), para. 39.
[109] CPI (Chambre préliminaire) C601/04601/06, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Décision sur la confirmation des charges, 29 janvier 2007, para. 90, para. 84.
[110] Petra Viebig, Illicitly Obtained Evidence at the International Criminal Court, International Criminal Justice Series, Volume 4, p. 258.